Les médias, parce que plus que de comprendre, ont fréquemment tendance à aller au plus vite et donc au plus facile, présentent la plupart du temps des portraits de surdoué.e.s qui font sensation.
Un.e surdoué.e ordinaire, finalement, ça ne les intéresse pas.
Il faut des sauts de classes, des études longues, des mentions, des profils encore plus atypiques qu’atypiques. Ce faisant, ceux et celles qui proposent leurs reportages, quels que soient les supports, continuent de propager toute une somme d’idées reçues et erronées sur les surdoué.e.s, notamment en soulignant leur intelligence, leur intellect, réduisant donc souvent à peau de chagrin ce fonctionnement si riche et si divers, et si ordinaire.
Bien sûr, des surdoué.e.s qui ont sauté une voire même plusieurs classes, ça existe, j’en connais, j’en fais même partie. Des qui ont leur bac avec mention, aussi. Des qui ont redoublé, aussi. Des qui ont eu une scolarité brillante, ou difficile, ou ni l’une ni l’autre, aussi. Des qui ont fait de longues études, des qui ont repris une formation à 50 ans passés, des qui ont un CAP et travaillent depuis leurs 14 ans, des qui ont déjà changé plusieurs fois de métiers et qui excellent à chaque fois, des qui se plantent, des qui errent, des qui font parfois un peu tout cela à la fois, aussi.
Bien sûr, être surdoué.e c’est complexe, ça joue sur tous les tableaux, c’est en montagne russe, on se trouve, on se perd, on est paumé, on trouve un chemin, on se rend compte que ce n’est pas le bon, on se retrouve sur un autre qu’on n’aurait jamais envisagé et là on est à sa place, et ça recommence, bref, on erre, comme tout le monde.
Bien sûr, voir et vivre le monde quand on est surdoué.e, c’est exceptionnel. Les surdoué.e.s sont des assoiffé.e.s d’azur, des poètes, des fous. Mais leur folie, leur poésie et leur quête d’infini peuvent être très ordinaires. Et surtout, surtout, elles dépassent largement la question de l’intelligence. Les surdoué.e.s ne sont pas une race à part, une bande de génies intellos capables de tous les exploits et tellement à côté de la plaque pour tout le reste.
Mais, c’est tellement plus facile de ne regarder que le côté intellectuel des surdoué.e.s, ça les résume à leur QI, en quatre mots, ça clot le débat.
L’écrasante majorité des reportages faits sur les surdoué.e.s les peignent comme des bêtes de foire un peu curieuses. Comme s’ils/elles étaient des êtres à part, hors normes, extrêmement intelligents. Point. Ne cherchons pas plus loin.
Se cantonner à la seule intelligence quand il s’agit des surdoué.e.s, pire à la seule scolarité, c’est non seulement passer à côté de ce qu’ils/elles sont vraiment : des personnes qui ressentent et vivent le monde avec une immense acuité et intensité, mais c’est aussi continuer de proposer des clichés sur la douance, ce qui permet de ne pas faire avancer la réflexion, là où justement les surdoué.e.s ont tendance à pointer du doigt ce qui mériterait urgemment d’être pensé.
Un épouvantail à réflexion vous dis-je.
Car, en considérant que les surdoué.e.s constituent une race à part, qui ne fait rien comme les autres, qui pose des questions bizarres et existentielles, cela permet d’éviter de se les poser vraiment, comme si ça ne concernait que ces agités du ciboulot qui décidément, sont bien en peine pour trouver leur place dans la société.
Se focaliser sur le côté exceptionnel des surdoué.e.s permet de rester sourd à ce qu’ils/elles disent. Cela permet de continuer à penser en rond. Chacun chez soi et les moutons sont bien gardés.
De même qu’il sera, j’en suis convaincue et persuadée, toujours plus pertinent et enrichissant pour tout le monde d’écouter ce que les surdoué.e.s ont à dire sur l’enseignement et l’apprentissage, et ainsi les penser avec leurs yeux et voir ce que cela ouvre comme perspectives plutôt que d’essayer de mettre un rond dans un carré, il serait plus pertinent et enrichissant pour tout le monde d’écouter ce qu’ils/elles disent par leur fonctionnement, ce qu’ils/elles pointent comme dysfonctionnements et par là-même comme champ des possibles.